Traversée des Hautes-Chaumes du Forez France > Monts du Forez
Françoise et Gérard ont, cet hiver, traversé les Hautes-Chaumes du Forez en ski nordique. Trois jours et cent kilomètres de pur plaisir dans un site magnifique, au cœur du Parc Naturel Régional du Livradois-Forez. (Auvergne). Un terroir composé de landes et pelouses d'altitude, idéal pour la randonnée mais injustement méconnu.
Les Hautes-Chaumes du Forez
La traversée des Hautes-Chaumes du Forez est une randonnée nordique magnifique à entreprendre par beau temps de préférence ; d’une part pour profiter de la vue à l’Ouest sur le Sancy et le Puy-de-Dôme et à l’Est sur les Alpes, d’autre part pour éviter de s’égarer sur ces plateaux désertiques par temps de brouillard.
Nous sommes partis du col des Pradeaux (1197m), sans emprunter les pistes du domaine nordique, en prenant un chemin légèrement en-dessous du bar qui conduit au mur du barrage.
De là, nous avons contourné la retenue gelée par la droite (Est) puis gagné les Jasseries de la Fayolle en croisant la piste de ski venant de Prabouré.
Nous nous sommes dirigés vers la forêt des Allebasses que nous avons longée à l’Est par la piste qui conduit à la croix de Pialoux pour arriver rapidement au col des Supeyres (1365 m).
Frontière naturelle
Ce col est un point de départ pour les randonnées nordiques, ou à raquettes en hiver, à la journée en direction du Nord sur les hautes chaumes du Forez. Il est aussi très connu des adeptes de snow kite pour ses landes vierges et ventées.
Devant nous, notre point de mire : les « radars »* trois mâts hérissés d’antennes paraboliques érigés sur le point culminant des monts du Forez, Pierre-sur-Haute, 1634 mètres d’altitude.
Les monts s’étirent du Nord au Sud sur une trentaine de kilomètres à vol d’oiseau, plateaux couverts de callune, de myrtilles, de gentianes, d’arbustes malingres mais résistants et de petits pins consécutifs aux campagnes de reboisement, alternant avec des vallées boisées assez profondes.
Montagnes d’estive à la belle saison, les Hautes-Chaumes sont parsemées de « jas », l’équivalent des burons auvergnats, des fermes aux toits pointus, où l’ont fabriquait autrefois la fourme, de Montbrison ou d’Ambert selon le versant du massif.
Ces hautes terres servent de frontière naturelle à deux régions administratives et physiques : à l’Est, la plaine du Forez, peuplée et industrieuse, à l’Ouest, la vallée de la Dore puis les Monts du Livradois, territoire de moyenne montagne touché de plein fouet par l’exode des campagnes.
Le terrain est propice à la pratique du ski nordique, surtout lorsque l’enneigement est important comme cette année.
Par temps clair, nous pouvons nous diriger à vue, faisant fi des nombreuses clôtures.
Des Supeyres, nous avançons donc sur le plateau des Egaux, puis contournons par l’Ouest le suc de Pégrol, en suivant grosso modo le cheminement du GR3.
Sentinelles
De plus en plus massifs, les radars, sentinelles blanches dans ce désert blanc, nous servent de guide. Nous passons à leur pied, après avoir laissé, légèrement en contrebas, les burons de la Richarde et la petite chapelle reconstruite récemment qui, le 15 août, attire une foule nombreuse pour une messe des bergers.
En suivant les courbes de niveau, un peu au-dessus de la lisière de la forêt et du buron de Reclavet, nous remontons toujours au Nord vers le col de la Chamboite.
Des poteaux massifs indiquent le passage du GR3, repères indispensables pour la chenillette qui relie les militaires de Pierre-sur-Haute au reste du monde au cœur de l’hiver.
La route entre le col de Chamboite et le col du Béal a été partiellement ouverte à la fraiseuse. Nous la longeons plutôt que d’entreprendre l’« ascension » du Peyre Mayou, 1542 mètres, sommet de rochers qui a aussi donné son nom à une liqueur de pays à base de myrtilles locales.
Dans une neige de printemps, transformée mais encore assez glissante, voilà bien six heures que nous skions lorsque nous arrivons au col du Béal (1390 m). Le gîte est fermé.
Nous y aurions pourtant bien fait étape, la journée étant suffisamment longue. Mais il faut continuer : nous avons réservé au gîte du col suivant, le col de la Loge.
Familiers du Sud des Hautes-Chaumes où nous skions souvent en hiver, nous voici, de l’autre côté des radars, dans un environnement beaucoup moins connu. Du Béal, nous apercevons au pied de Pierre-sur-Haute le haut des pistes de ski de Chalmazel, unique station alpine du Forez (excepté les quelques pistes familiales de Saint-Anthème).
Le soleil marque l’approche de la fin de journée. Il nous faut reprendre le chemin pour le dernier petit tiers de cette « grande traversée ».
Avec la carte et la boussole, nous nous orientons vers un petit sommet à 1426 mètres, selon l’itinéraire du GR3 dont nous n’arrivons pas à trouver les balises sous l’épaisseur de neige.
Sur le plateau, nous croisons des pistes de fond damées et justement… la dameuse !
L’employé nous dit qu’en suivant les pistes vers le Nord, nous arriverons au col de la Loge. D’ailleurs, il n’y a guère d’autre moyen que d’emprunter les pistes qui traversent la forêt des Deux Boules puis contournent la Montagnette, comme le fait le GR, pour atteindre enfin notre destination, le col de la Loge, 1253 mètres.
Entre chien et loup, après une belle journée de ski (8 heures, pauses incluses, mais brèves !), nous sommes heureux d’arriver, d’autant que l’accueil est agréable dans cette structure qui propose des petites chambres pour cinq personnes très correctes et une demi-pension simple mais copieuse et bonne.
Tour du Pic Pelé
Le deuxième jour, nous avons prévu un « petit tour », pour découvrir ce versant Nord du Haut Forez : le tour et l’ascension du Vimont ou Pic Pelé (1348 m).
En direction du Nord-Ouest, à travers bois, nous nous dirigeons sur la Petite Croix point de départ du chemin forestier qui suit les courbes de niveau pour faire le tour du Vimont (chemin balisé pour VTT). C’est un peu monotone, d’autant que les trouées et les échappées vers les monts boisés sont plutôt rares. Au pied du Vimont, le sentier reprend de l’intérêt : il grimpe sans trop de brutalité vers la lande et les cailloux de ce pic Pelé d’où la vue porte loin sur les monts du Livradois déjà verdoyants et même sur les monts d’Auvergne encore bien enneigés.
A nos pieds, des fumées s’élèvent dans les bois. Des villages scintillent, La Chambonie notamment…
Le soleil de cette toute fin d’hiver permet une pause agréable, bien calés dans les rochers à l’abri du vent. Après le déjeuner, nous bouclons le tour en revenant à la Petite Croix et faisons un peu de zèle en passant par le col des Placiaux (1152m). Le chemin creux qui revient sur la Loge par la forêt est magnifique mais insuffisamment enneigé.
Le retour au col des Pradeaux
Le troisième jour, le retour s’effectue sensiblement selon le même parcours qu’à l’aller à quelques nuances près.
Du col de la Loge, nous prenons la piste vers les Deux Boules, mais au sortir de la forêt nous traversons la lande en contournant la petite forêt de la Pigne pour rejoindre, en dessous du col du Béal, la route qui descend à Chalmazel. Nous la traversons. De là, à vue, nous gagnons le sommet de Peyre Mayou.
La neige est gelée, les maigres arbres sont couverts de givre et le vent souffle au sommet, mais la vue est généreuse sur le Forez comme sur l’Auvergne.
La descente sur le col de La Chamboite, moyennant quelques lacets, se négocie assez facilement dans cette neige moitié croûtée moitié fondante.
De là, nous décidons de suivre la courbe de niveau pour contourner Pierre-sur-Haute et atteindre la chapelle de la Richarde. Du pur tout terrain, pas très confortable car on skie sur les carres, en passant au-dessus du couvert forestier et du buron de Reclavet.
Pause casse-croûte à la Richarde, au pied du phare hivernal des radars, puis direction, toujours à vue, sur le col des Supeyres, facilement repérable grâce à la lisière géométrique de la forêt des Allebasses.
A notre droite (Ouest), la montagne de Monthiallier où nous apercevons deux randonneurs à ski.
Des Supeyres, nous ferons dans la simplicité en prenant la piste damée qui longe par l’Ouest la forêt des Allebasses depuis la croix du Pialou.
Plus loin, nous laissons à notre gauche la piste qui traverse le ruisseau des Pradaux et rentre à la station de Prabouré, pour continuer plein Sud sur le col des Pradeaux.Et nous arrivons par la très jolie piste qui va côtoyer le barrage avant d’atteindre le col.
La journée a été encore plus longue qu’à l’aller, environ 10 heures (dont une heure et demie de pauses), mais très belle.
Elle s’achève sous les chants d’oiseaux qui contrastent singulièrement avec les blocs de glace qui ourlent encore les berges du plan d’eau des Pradeaux…
Informations pratiques :
Cartes utilisées : Cartes IGN série Bleue : Saint-Anthème 2733 E, Saint-Georges-en-Couzan 2732 E, Saint-Martin-La-Sauveté 2731 E, Noirétable 2731 O.
Hébergement : Chalet du col de la Loge, 42440 La Chamba, 04 77 24 70 76
Conseils : nous préconisons vivement l’utilisation du GPS car il peut être difficile et dangereux de s’orienter sur ces hauts plateaux par temps de brouillard qui peut arriver très rapidement.
* L’origine des radars
Il y a des installations à Pierre-sur-Haute depuis le début du 20ème siècle (disons 1905 environ). Il s’agissait alors d’un télégraphe militaire optique (dit de Chappe) qui correspondait avec celui du Puy-de-Dôme.
Les installations, dans une forme proche de ce que nous connaissons actuellement, ont été mises en place à partir de 1956. Il s’agit, depuis cette date, d’une station Hertzienne de réception et de réémission de faisceaux.
De 1956 à 1983, ces installations prenaient la forme de quatre grosses « oreilles de Mickey » orientées aux quatre points cardinaux. Celles-ci ont été démontées en 1983 pour être remplacée par 3 petites tours plus discrètes équipées de réflecteurs au sol (« poêles à frire ») dans lesquels les signaux sont amplifiés.
La station de Pierre-sur-Haute est spécialisée dans les échanges entre la métropole et les DOM-TOM. La plupart des informations entre la France d’Outre-mer et le continent passent par là, d’où son importance stratégique !
Dernière subtilité : nous pouvons désormais parler d’un radar mais ce seulement depuis … 2008, date à laquelle la Direction Générale de l’aviation Civile a implanté sur la plus haute tour un véritable radar dont la mission est civile, destinée à renforcer la surveillance des zones d’approche des aéroports de Lyon-Saint Exupéry et Clermont-Aulnat. Cet équipement permet en outre d’avoir un œil sur le trafic aérien dans la vallée d’Ambert qui jusque là échappait à tout contrôle ! (Informations aimablement communiquées par le Parc Naturel Régional du Livradois-Forez).
Crédits texte & photos : Gérard Rivollier et Françoise Boussoulade