Ski-Rail en Laponie suédoise Suède > Kebnekaise
France - Laponie en train : une autre approche du voyage nature
« Après une traversée de l’Islande à pied et une descente de la rivière Rupert dans le Grand Nord Québécois, après être tombé profondément amoureux des ambiances nordiques, nous jetons, aujourd’hui, notre dévolu sur la Laponie suédoise.
Éviter les sauts de puces, respecter les distances que nous offre la planète, rendre à la Terre sa vraie grandeur…pour cela, le train s’impose. Une douce traversée de l’Europe, de la France à la Suède, un atterrissage en douceur dans les immensités du Nord pour un raid à ski des plus dépaysants… »
En préparant ce projet, Fanny Cathala souhaite réfléchir à une autre manière de voyager loin tout en restant dans une logique de respect du milieu.
Elle a réalisé un dossier sur ce raid nordique hors du commun. Vous y découvrirez tous les aspects de ce voyage, pratique, logistique, environnemental… Nous vous proposons, ici, le récit jour après jour sur la Kungsleden. Pour des raisons de lisibilité, nous avons fait le choix de ne publier que la partie : randonnée nordique sur la voie royale en Laponie. Le dossier complet est accessible ici : Ski-Rail en Laponie.
« Peu de mots me viennent à la bouche pour qualifier cette lumière, ces grands espaces, la magie des paysages nordiques… »
Kungsleden, jours après jours
Jour 1 : Abisko-Abiskojaure
- Distance : 12 km
- Dénivelé : + 105 m
- Difficulté : Facile
Le trail part du village d’Abisko Turistation et longe la rivière gelée. Nous suivons le balisage au milieu de la forêt de bouleaux. Au loin, les montagnes dans lesquelles nous allons nous engouffrer. Nombreuses traces d’élans et premières traversées de rivières et de lacs gelés. La glace sonne creux et, à tort, nous serrons les fesses… jusqu’à ce que deux motos-neige nous passent devant à toute vitesse ! Une journée comme dans nos rêves.
Le refuge se situe au bout du lac d’Abiskojaure. Le gardien annonce –36°C mais nous passons la nuit sous la tente. Très bon accueil. Aurore boréale, mais de faible luminosité.
Jour 2 : Abiskojaure - lac de Radujavri
- Distance : 15 km
- Dénivelé : + 330 m
- Difficulté : parcours long
La journée commence par une longue montée. Amandine ne pouvant tirer une pulka, nous avons donc fait le choix d’atteler les deux pulka à trois personnes. L’effort est ainsi réparti.
Sur le plat, c’est un véritable plaisir de tirer les pulkas. En montée, cela devient vite exténuant ! Nous mangeons au milieu d’un immense plateau avant de redescendre sur les lacs, véritables autoroutes du Nord. Au passage, nous observerons des rennes et un lagopède. Nous passons la nuit sous la tente près de la cabane de secours au bord du lac de Radujavri. Encore une fois, de faibles aurores balayent le ciel.
Jour 3 : lac de Radujavri – refuge de Tjaktja
- Distance : 18 km
- Dénivelé : + 220 m
- Difficulté : parcours long
Trois bonnes heures sont nécessaires pour rallier le refuge d’Alesjaure et terminer ainsi l’étape de la veille. A Alesjaure, après un repas copieux autour du puits dans la glace, nous décidons d’effectuer la troisième étape pour rejoindre le refuge de Tjaktja. Le ciel se couvre et le vent se lève. Nous remontons une large vallée. Les derniers kilomètres en montée sont exténuants. Nous décidons de passer la nuit au refuge. Très bon accueil du gardien et de sa petite fille de trois ans, véritable petit lutin des neiges. Le vent souffle toute la nuit.
Jour 4 : refuge de Tjaktja – refuge de Salka
- Distance : 12 km
- Dénivelé : +150 m/-300 m
- Difficulté : facile mais long sur les derniers kms
Le col de Tjaktja (1150 m) est le point le plus haut de l’itinéraire. Il est d’usage de dire que pour comparer cette altitude à celles des Alpes, il faut rajouter 2000 mètres. La montée au col se fait tout en douceur. Un abri de secours est ouvert à son sommet. Nous y mangeons à l’abri du vent. La descente, difficile, dans la vallée de Salka avec les pulkas est épique et chacun cherche la meilleure manière de les diriger.
Nous évoluons à présent au cœur d’une vallée glaciaire. Les montagnes qui nous dominent sont des plus imposantes. Au refuge de Salka, nous faisons un tour au sauna, profitons du poêle…et passons la nuit sous la tente ! Pour la nuit, nous avions adopté sac de couchage en duvet (t° de confort de 0°) dans un sac de couchage synthétique. Grâce à cela, nous avons largement supporté les températures négatives dans la tente. Et lorsque le tout est jumelé, il y fait +20°C !
Nombreuses possibilités de randonnées en étoile autour de Salka.
Jour 5 : refuge de Salka- refuge de Singi
- Distance : 12 km
- Dénivelé : - 100 m
- Difficulté : facile
Etape magique venteuse !
A plat, au cœur du massif de Kebnekaise, le paysage change sans cesse. De nouvelles vues s’imposent à nous, toutes plus belles les unes que les autres !
Nombreux rennes. Fort vent, un vrai temps du Nord !
Abri de secours à 5 km de Salka. Singi est situé à l’extrémité d’un village Same. La gardienne vient à notre rencontre. « You are welcome ! ». Vive l’accueil suédois.
Jour 6 : Singi – station de Kebnekaise
- Distance : 14 km
- Dénivelé : +120/-150 m
- Difficulté : Facile
Les vallées ne cessent de s’approfondir et les montagnes de grandir. Des falaises apparaissent. Paysages très alpins. Une très belle étape ! Des rennes à ne plus savoir qu’en faire !
La dernière et courte montée sur la station de Kebnekaise est quand même éprouvante. La station de montagne de Kebnekaise est un véritable centre de vacances. Hôtel, sauna, magasin de location de matériel, restaurants, services d’accompagnements…toutes les activités alpines y sont pratiquées. Nous plantons la tente au milieu des bouleaux et profitons des services offerts. Kebnekaise constitue un doux retour à la civilisation… il n’y a pas affluence !
Jour 7 : repos
Jour 8 : Kebnekaise – Nikkaluokta
Après avoir campé à 3km de Kebnekaise, nous prenons la direction de Nikkaluokta, notre dernière étape avant la fin du voyage. Nous retrouvons les forêts de bouleaux et traversons notre dernier lac. Le ronronnement des motos-neige qui emmènent les touristes à Kebnekaise nous ramène à la réalité. Adieu les montagnes, Adieu le Nord…
Jour 9 : retour en bus sur Kiruna
2 bus par jour font la liaison sur Kiruna. Il en coûtera 116 kr. Le voyage dure une heure et donne l’occasion d’observer des élans.
Kiruna est la grande ville du Nord. On y trouve toutes les commodités…sauf durant le long week-end de Pâques où les Suédois partent tous…dans les montagnes !
Pas de chance pour nous donc… seul le magasin de souvenirs est ouvert ! Les Suédois nous regardent un peu comme des extra-terrestres lorsque nous traversons la ville en tirant les pulkas !
En ville, nous découvrons les Kicksledge. C'est une sorte de luge que l'on pousse devant soi et qui permet de se déplacer debout sans risquer la chute à chaque pas. Ces Kicksledge sont garées devant les maisons ou à l'entrée des magasins, fixées avec un antivol exactement comme chez nous les vélos. Et pour la petite histoire, en Laponie, les vélos ont les pneus cloutés !
Après un si beau voyage et une approche responsable, Fanny conclut sous forme d’interrogations lancées aux randonneurs et aux voyagistes…
« Une chose m’étonne toujours en feuilletant les catalogues des agences de voyages : l’ensemble des agences prône des voyages responsables mais peu d’efforts sont faits pour favoriser l’accès aux destinations par d’autres moyens que l’avion. L'Europe offre pourtant un beau réseau ferré tout à fait compatible avec des distances moyennes. »
La Kungsleden, en bref
La Kungsleden est un sentier de randonnée au nord de la Suède (Laponie). Il est divisé en quatre parties correspondant chacune à environ une semaine de marche. Sa création remonte à la fin du XIXe siècle, à l'initiative du Svenska Turistföreningen (STF), homologue suédois du Club alpin français. L'itinéraire a progressivement été équipé en refuges (tous les 20 km environ, principalement dans la partie Nord).
Tronçon parcouru : Abisko - Nikkaluokta (110 km)
Localisation : 200 km au Nord du cercle polaire.
Refuges : Ce tronçon est équipé de refuges tous les 15 km en moyenne. Les refuges suédois sont des exemples en matière de confort. On y trouve souvent une « drying room » pour faire sécher ses affaires. Chaque pièce est équipée d’un poêle, d’une gazinière et de vaisselle, dans la salle commune. Certains refuges sont équipés de sauna et proposent une petite épicerie. Les refuges n’ont pas l’électricité et les corvées d’eau (dans les trous creusés dans la glace de lacs) et de bois sont inévitables. Le prix en 2010, pour une nuit, est de 360 kr (36 euros) pour les non-membres du STF et 100 kr de moins pour les membres.
Pour notre part, nous avions tout le matériel nécessaire pour effectuer le raid en autonomie.
Nous avons donc passé nos nuits sous tente et profité, parfois, de la proximité des refuges qui proposent pour 100 kr (10€) l’accès aux parties communes.
Une seule nuit a été passée en refuge…une tempête pointant son nez.
Climat :
Du Nord…
Le soleil a largement dominé durant cette traversée. Seulement deux jours nuageux.
Les températures ont toujours été négatives et peuvent descendre bien bas la nuit (-25°C). En journée, elles tournent autour des –10 à -5°C.
Températures basses donc, mais le corps s’y habitue, si bien qu’à –5°, il fait chaud ! Attention toutefois lorsque le vent souffle. La température ressentie diminue à grande vitesse. Attention aux Suédois lorsqu’ils annoncent des températures entre 10 et 5… il faut rajouter un – devant !
Cartes :
- Carte BD6 Abisko – Kebnekaise
- Carte BD8 Kebnekaise - Saltoluokta
Fréquentation :
Nous ne savions pas trop à quoi nous attendre quant à la fréquentation du trek. En journée, nous ne croisions pas grand monde (en moyenne 5 personnes, je pense, + les motos-neige).
L’essentiel des rencontres se faisait dans les refuges.
Paradoxalement, c’est l’hiver que l’activité est la plus intense dans le Nord. Les fleuves et les lacs gelés permettent un accès aisé aux motos-neige qui en profitent donc pour ravitailler les refuges pour la saison d’Eté. L’été, ils sont coupés du monde. Les Sames ne se déplacent, aujourd’hui, qu’en motos-neige. Nous n’avons pas croisé de motos-neige de loisirs…ce type de nuisance ne nous a donc que peu gênés jusqu’à Kebnekaise, d’autant plus que nous n’en avons croisés qu’à proximité des centres importants (Kebnekaise et Abisko).
Transport du matériel :
Deux pulkas pour quatre. Amandine, enceinte de 4 mois ne pouvait rien tirer, ce qui explique ce choix et ce qui nous obligeait à aménager des demi-journées de repos.
Topo complet de la Kungsleden
Textes et photos : Fanny Cathala & Charles Gilbert